SOURCE: LA PRESSE

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

Selon les auteurs, 27 % des Québécois se privent de soins dentaires pour des raisons financières.

Au cours des dernières décennies, les soins de santé buccodentaire au Québec et au Canada se sont beaucoup améliorés, notamment grâce au travail dévoué de nos dentistes et hygiénistes dentaires et à l’engouement de la population pour ces services. Toutefois, l’incapacité de payer d’une part grandissante de la population est bien réelle et documentée.

Malgré une qualité des soins sans précédent, plus du quart (27 %) des Québécois se privent de soins de leur bouche pour des raisons financières.

Au Canada, les régimes d’assurance privés et publics conditionnent jusqu’à un certain point l’accès à ces services. Ainsi, les Canadiens qui n’ont pas de programme d’assurance dentaire risquent trois fois d’éviter de consulter un professionnel dentaire en raison du coût que ceux qui souscrivent à un programme d’assurance dentaire (39,1 % contre 13,7 %).

Malheureusement, pour beaucoup de personnes dans notre société, le coût et les autres barrières à l’accès aux soins s’ajoutent à un état de santé déjà fragilisé. Au Québec, la Régie de l’assurance maladie du Québec (RAMQ) ne couvre que certains services pour les enfants de moins de 10 ans, et aucune couverture universelle n’est prévue pour les enfants plus âgés.

À titre d’exemple, les élèves de 6e année dont la mère n’a pas terminé ses études secondaires sont deux fois plus susceptibles de montrer un besoin évident de traitement lié à la carie que les élèves dont la mère possède un diplôme d’études postsecondaires (21,5 % contre 8,3 %). Chez ces enfants, un accès compromis aux services de santé buccodentaire peut entraîner des conséquences qui nuisent à la qualité de vie, comme de la douleur, un abcès ou la perte de dents. Les conséquences peuvent être tragiques.

La science documente de plus en plus l’interconnexion des enjeux de santé dentaire et de santé générale.

La santé buccodentaire est une composante essentielle de la santé générale d’un individu, et les données scientifiques récentes nous renseignent sur les liens bidirectionnels existant, notamment, entre l’inflammation des gencives et les troubles métaboliques tels que le diabète.

Toutefois, il manque des données récentes sur l’état de santé buccodentaire des Canadiens puisque l’enquête la plus récente remonte à 2007. Dans ce contexte, nous saluons l’excellente initiative des Instituts de recherche en santé du Canada qui, à la hauteur de 3,3 millions de dollars, financeront la prochaine enquête pancanadienne de santé buccodentaire. L’enquête se déroulera en 2022-2023 et s’inscrit dans le cadre plus large de l’Enquête canadienne sur les mesures de santé, et permettra ainsi d’étudier les liens entre la santé buccodentaire et la santé générale.

Des telles données à jour sont essentielles pour une mobilisation des professionnels en soins dentaires, de la population et de nos gouvernements, en vue de réduire les inégalités sociales en santé et de corriger les iniquités systémiques dans l’offre de services de santé buccodentaire. À notre santé !

* Félix Girard est professeur agrégé à la faculté de médecine dentaire de l’Université de Montréal. Aimée Brennan-Dawson est professeure agrégée à la faculté de médecine dentaire de l’Université Laval. Paul Allison est professeur à la faculté de médecine dentaire de l’Université McGill.