Les molécules naturelles ayant des propriétés santé se cachent parfois là où on ne les attend pas. C’est le cas du québécol, un polyphénol présent dans le sirop d’érable, dont le potentiel contre les maladies parodontales vient d’être confirmé par une étude publiée par des chercheurs de l’UQAR et de l’Université Laval dans ACS Omega, une revue l’American Chemical Society.
«Les maladies parodontales affectent les tissus de soutien de la dent, notamment les gencives et le tissu osseux, explique l’un des auteurs de l’étude, Daniel Grenier, de la Faculté de médecine dentaire et du Groupe de recherche en écologie buccale de l’Université Laval. Au départ, elles sont causées par des bactéries de la bouche, mais la réaction immunitaire qu’elles provoquent entraîne une inflammation qui entretient et amplifie le problème.»
En effet, en présence de ces bactéries néfastes, certaines cellules du système immunitaire, les macrophages, produisent des enzymes, les métalloprotéinases matricielles (MMP), qui attaquent les tissus de soutien de la dent. «Si une gingivite n’est pas traitée, elle peut évoluer vers une parodontite où le tissu osseux qui soutient la dent est affecté. La dent devient mobile et elle peut tomber. Un traitement idéal contre les maladies parodontales devrait s’attaquer aux bactéries néfastes, réduire la production des MPP et favoriser les ostéoblastes, des cellules qui fabriquent du tissu osseux», résume le professeur Grenier.
Les travaux antérieurs de cette équipe n’ont pas démontré d’effet direct du québécol sur les bactéries responsables des maladies parodontales. Par contre, ils ont mis en lumière les propriétés anti-inflammatoires de cette molécule. Dans leur dernière publication, les chercheurs présentent les résultats de tests mesurant l’efficacité du québécol pour réduire la production de MPP et pour favoriser la formation de tissus osseux. Leurs conclusions? Les tests menés sur des cultures cellulaires montrent qu’en présence de québécol, la concentration de certaines enzymes MPP est réduite de moitié, alors que l’activité des ostéoblastes peut passer du simple au triple, selon la dose de québécol utilisée.
«Nos résultats suggèrent que le québécol pourrait atténuer les dommages tissulaires causés par les maladies parodontales et favoriser la formation du tissu osseux, résume Daniel Grenier. On pourrait tirer profit de ses propriétés en incorporant cette molécule dans des gels ou dans des fibres que les dentistes appliqueraient directement sur les tissus affectés. Il s’agirait d’une avenue de traitement intéressante, notamment parce qu’elle évite de recourir à des antibiotiques.»
Rappelons que le québécol est une molécule qui apparaît pendant le processus de fabrication du sirop d’érable, à la suite de réactions chimiques qui transforment les polyphénols naturellement présents dans l’eau d’érable. Cette molécule a été découverte en 2011 par des chercheurs du Rhode Island. En décembre 2012, ils parvenaient à la synthétiser en laboratoire. Huit mois plus tard, Sébastien Cardinal, maintenant professeur à l’UQAR, et Normand Voyer, du Département de chimie de l’Université Laval, rendaient publique une méthode plus efficace pour synthétiser le québécol et ses dérivés. «La concentration de québécol dans le sirop d’érable est excessivement faible, signale le professeur Grenier. C’est grâce à sa synthèse en laboratoire que nous pouvons mener des travaux sur cette molécule.»
L’étude parue dans ACS Omega est signée par Sébastien Cardinal, de l’UQAR, et par Amel Ben Lagha, Jabrane Azelmat et Daniel Grenier, de l’Université Laval.